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LA STEVIA, DAUPHINE DES ÉDULCORANTS


La dernière génération d’édulcorants arrivés sur le marché (sucrettes, chocolat, produits laitiers, boissons aromatisées), est de la classe des stéviosides. Ces édulcorants naturels extraits des feuilles d'une plante tropicale, la Stevia rebaudiana sont dénommés de ce fait sous le terme générique de stévia. 



Le pouvoir sucrant de la stévia a été utilisé de façon empirique et très ancienne par certaines populations d'Amérique latine où ces plantes poussent à l'état sauvage. Ce n’est qu’en 1931 que les chimistes isoleront les glycosides du stéviol, responsables du goût sucré de la plante, dénommés stévioside et rébaudioside A, au pouvoir 240 fois plus sucrant que le saccharose. Ces glycosides ne sont pas résorbés mais transformés par des bactéries du colon en stéviol dont une forte proportion est absorbée puis excrétée par voie urinaire. 



Depuis quelques décennies, certaines nations sont devenues de grands producteurs (Chine et Asie orientale) de la stévia et d'autres de grands consommateurs (Japon). C’est plus récemment que le monde occidental s’est ouvert à ces édulcorants, principalement depuis que la FDA a donné en 2008 son autorisation pour l'utilisation des stevias aux USA. L’Union Européenne a entériné cet avis sur l'usage des glycosides du steviol en 2011, suite à l’avis favorable de l’EFSA (1). Depuis une quinzaine d'années, il semble que les industriels développent cette production de stéviosides (naturels issus de plantes, mais probablement demain de plus en plus de synthèse), offrant ainsi une possibilité de substitution à d’autres édulcorants (cyclamate, saccharine, aspartame..) dont l’innocuité est incertaine et/ou contestée, sans parler de leurs bénéfices sanitaires qui sont maintenant de plus en plus souvent infirmés. Un bémol : son prix, qui pourrait freiner son invasion. Il faut débourser 20 € pour 100 grammes de poudre, ce qui le rend dix fois plus cher que l’aspartame.

Toutefois, ce n'est pas parce qu'un produit est naturel qu'il est certifié sans risque et ce n'est pas parce qu'il n'a pas de toxicité aiguë qu'il ne déclenche pas d'effets délétères sur la santé à long terme. D’ailleurs historiquement, la stévia n’a jamais été consommée dans son usage traditionnel sous cette forme d’extraits de Rébaudioside A, mais sous forme de feuilles, en tisane. Des craintes ont été avancées sur une éventuelle action mutagénique, in vitro, des métabolites du stéviol (2). Une revue générale sur le Rébaudioside A n’a mis en évidence une génotoxicité chez l’animal que dans six études sur trente-cinq (3). De même, si une réduction de la fertilité avait été constatée chez les rats de façon très nette, mais seulement avec le produit naturel, des études ultérieures n'ont pas retrouvé les mêmes conséquences en étudiant cette fois-ci l'ingestion de l'extrait Rébaudioside A (4). Ces résultats contradictoires nous amènent à penser que dans le cas précis de la stévia, il se peut que nous manquions quelque peu de recul. 



Malgré tout, la dernière évaluation sur la sûreté des additifs de l’OMS, publiée en 2009, qui a analysé une revue approfondie des études expérimentales récentes à fortes doses du steviol sur les animaux conclut de façon plutôt rassurante (5). De même, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (ex-AFSSA) avait émis, en 2008, son premier avis (6) favorable à l’emploi du seul rébaudioside A (produit le plus sucrant), purifié à plus de 97%, en tant qu’additif alimentaire sur le fondement des études présentées qui montraient l’absence d’effets indésirables. Ses précédents avis négatifs insistaient sur l’exclusion des denrées alimentaires qui devraient subir un traitement thermique lors de la fabrication sous peine de dégradation. La recommandation de ne pas chauffer à plus de 100 à 120° les aliments contenant l’édulcorant est maintenue. Une DJA (dose journalière admissible) maximum de 4 mg/kg/j est suggérée. La commercialisation sous forme d’édulcorant de table a été  légalisée dans un arrêté publié le 15 janvier 2010 .En outre, il reste encore interdit de consommer les feuilles de la stévia séchées et broyées comme le faisaient les Indiens Guarani pour adoucir leurs tisanes.


Sur le plan des bénéfices diététiques, ce type d’édulcorant est recommandé par certains médecins, comme substitutif du sucre pour améliorer l'état des patients hypertendus, des diabétiques ou pour diminuer la charge calorique alimentaire chez les obèses. En effet, des auteurs ont retrouvé un effet bénéfique de la prise régulière de stéviosides qui réduirait la glycémie postprandiale du sujet diabétique, sans modifier la T.A. Par contre, il ne semble pas que ces édulcorants diminuent la demande sucrée, et donc n’atténuent en rien le risque concomitant d'entraîner une prise alimentaire plus grande d'aliments gras et sucrés, d'où une possible aggravation paradoxale du diabète de type 2 et de l’obésité (7). 

Du fait des résultats parfois discordants sur la toxicité animale du stéviol et de données faites sur des études à court terme, il est difficile d'en extrapoler une innocuité certaine à long terme chez l'homme. Faut-il accepter la stévia comme additif alimentaire anodin et banalisé c'est à dire comme une substance généralement reconnue pour sûre ("generally recognized as safe") ? Le débat est d'autant plus ouvert qu'elle serait consommée à grande échelle et à forte dose et que son utilité n'est pas, pour le moins, évidente comme pour tous les édulcorants en général.




Michel NICOLLE
Dominique LE HOUEZEC 

(1) EFSA journal 2010;8(4):1537. Scientific Opinion on the safety of steviol glycosides for the proposed uses as a food additive
(2) NUNES A.P.M.and al. 2007. Analysis of genotoxic potentiality of stevioside by comet assay.  Food Chem. Toxicol. 45, 662-666.
(3) KOBYLEWSKI S. and al. 2008.Toxicology of Rebaudioside A: A Review Department of environmental health sciences and molecular toxicology. UCLA. 2008
(4)  CURRY L.L and al.  Rebaudioside A: two-generation reproductive toxicity study in rats Food Chem Toxicol 2008,46/7S, S21-30
(5) WHO food additives series 60: Safety evaluation of certain food additives
(6) AFSSA – Saisine n° 2008-SA-0108 
(7) KIRTIDA R.and al. Health controversy over perceived benefits. J. Pharmacol Pharmacother  2011. 2  (4) 236-243

1 commentaire:

  1. PONZA Bénédicte25 janvier 2013 à 23:50

    Il existe par ailleurs dans les magasins d'alimentation biologique toutes sortes de produits sucrants (sirop de riz, sirop d’agave, sucre complet, etc…), délicieuses alternatives au sucre blanc raffiné ou aux édulcorants. Certains ont un index glycémique bas et un meilleur pouvoir sucrant (même s’ils sont plus chers que le sucre blanc classique, on en utilise moins).

    Ils mériteraient d’être mieux connus parce qu'ils sont sains et simples d’emploi. Moins caloriques que le sucre blanc, ils contiennent des minéraux et ils permettent aux enfants de découvrir des saveurs et des textures intéressantes.

    Cela dit ce n’est pas parce que le sirop d’agave a un index glycémique bas que l’on en met partout, et même avec ces sucres de qualité, la modération reste évidemment de mise !

    La stévia existe aussi en bio, vendue il me semble sous forme de poudre, pour un prix un peu inférieur à celui que vous mentionnez (environ 14 euros pour 100g).

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