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LE VACCIN, LA MYÉLINE ET L'ENFANT



Ce texte est dédié à Raphaël et à ses parents qui se battent avec un courage et une ténacité remarquables afin d’améliorer la santé de leur fils et faire enfin reconnaître l’origine de ses maux.




Depuis le lancement de la campagne de la vaccination dite universelle contre l'hépatite B dans notre pays (années 1994-1995), une polémique continue de faire débat à propos des éventuelles complications rapportées dans les suites de ce vaccin. La complication la plus connue et la plus médiatisée, car la plus souvent rapportée, est la survenue d'une sclérose en plaques (SEP). Cette affection est une atteinte spécifique auto-immune de la gaine de myéline qui entoure les fibres nerveuses du cerveau, de la moelle et du système nerveux périphérique. Cette destruction ciblée est donc qualifiée de « démyélinisation ».

La grande majorité des scléroses en plaques rapportées à la Pharmacovigilance nationale (ex-AFSSAPS devenue ANSES) l’ont été grâce à l’association REVAHB qui recense depuis 1997 les victimes de ce vaccin. Ces SEP ont été observées chez des adultes jeunes ou plus rarement chez des adolescents, âges de prédilection de cette maladie. Du fait du doute sérieux qui réunissait dans un lien temporel le vaccin et l'apparition de premiers signes de démyélinisation, le Ministre de la Santé de l'époque, Le Dr KOUCHNER, décida en septembre 1998 de suspendre la campagne de vaccination des jeunes collégiens et de réserver en priorité ses recommandations de vaccination systématique aux nourrissons et aux seuls adultes à risque de contracter cette infection (personnel de santé en particulier).

Outre le caractère captif de cette population infantile plus facile à atteindre, l'autre raison était la rareté des complications vaccinales décrites dans cette tranche d'âge. Certains médecins, en charge de responsabilités dans cette campagne vaccinale, n'hésitaient pas à forcer la note et à prétendre que le jeune enfant ne pouvait pas se démyéliniser puisqu'il n'avait pas de myéline ou presque : «Il n'y a pas de cas rapporté en dessous de l'âge de 3 ans car le nourrisson n'a pas de myéline ou tout du moins elle est en formation...» (1). Un autre expert, pourtant Professeur de Pédiatrie, prétendait que l'on n'avait jamais observé de cas de démyélinisation « chez l'enfant en-dessous de 7 ans du fait de raisons physiologiques (faible myélinisation) »(2)

Ces affirmations de réassurance gratuite étaient à l'époque démenties par les rapports de la Pharmacovigilance française. On pouvait par exemple lire dans le rapport national de l’année 2000 de l’AFSSAPS (3) ceci : 

- "Chez les enfants de moins de 3 ans, le nombre de cas rapportés est inchangé par rapport au dernier bilan " (septembre 1998), 
-  puis plus loin "Il faut rappeler qu'une seule observation avait été retenue comme étant réellement une affection démyélinisante centrale. Il s'agissait d'une enfant âgée de 25 mois sans antécédent notable chez laquelle est survenue 22 jours après l'administration d'HBvax-DNA une variante de la sclérose en plaques"
-  et enfin "une atteinte démyélinisante périphériques avait été rapportée chez un garçon de 28 mois" (Guillain-Barré).

L'association REVAHB a eu malheureusement aussi à recueillir quelques observations graves d'affections démyélinisantes du nourrisson. L’une des plus typiques et des plus dramatiques est celle d’un jeune garçon, Raphaël, qui alors âgé de 5 puis 6 mois reçut deux injections successives du vaccin Engérix B. Si la première injection avait déjà donné lieu à des modifications notables et déjà inquiétantes de son comportement, la seconde déclencha dans les jours qui suivirent des troubles de la conscience associés à des spasmes en flexion (forme d’épilepsie spécifique du nourrisson) incessants. Cet épisode neurologique aigu régressif sous un traitement corticoïde et antiépileptique laissera des séquelles neuropsychiques lourdes bien que régressives. L’IRM cérébrale réalisée quelques mois après l’épisode initial avaient révélé un aspect de démyélinisation sus et sous-tentorielle du système nerveux central. Le diagnostic initial évoquait une leuco-encéphalite ou une leucodystrophie selon les neuropédiatres qui s’étaient penchés sur ce dossier.

Devant l’évolution régressive au fil des ans des troubles neurologiques de cet enfant, la disparition de l’épilepsie et l’apparition de progrès constants, une  demande de mise à jour de la fiche de Pharmacovigilance du jeune Raphaël avait été demandée. En effet cette fiche concluait initialement dans ces termes «Leucodystrophie d’origine et d’évolution inhabituelle. Il ne s’agit pas d’une démyélinisation». Ce refus de reconnaître à l’époque la possibilité d’une démyélinisation était pourtant en totale contradiction avec les aspects radiologiques des deux IRM réalisées antérieurement et où il était bien écrit « démyélinisation du SNC» (système nerveux central). Ceci était également en contradiction avec l’avis de l’expert neuropédiatre de l’AFSSAPS (4) qui écrivait: «Je crois que l’on peut en tous cas penser qu’il ne s’agit pas d’une leucodystrophie métachromatique ou autre leucodystrophie métabolique, mais plutôt d’une leuco-encéphalite inflammatoire». A force d’insistance, une mise à jour en 2004 prit alors la forme de: « Leucodystrophie ou leucoencéphalite d’origine inconnue et d’évolution inhabituelle. Il ne s’agit pas d’une démyélinisation »

La démyélinisation n’existait donc toujours pas pour l’AFSSAPS en 2004 puis, y fit curieusement son apparition en 2007. On retrouvait en effet alors dans les écrits officiels de l’Agence (5) à propos de ce dossier complexe qu’il s’agissait « d’un possible épisode de démyélinisation aiguë chez un enfant de moins de 2 ans (qui) ne permet pas de retenir un diagnostic de SEP et ne rejette pas le diagnostic initial de leucodystrophie ». Il est vrai que tous les examens métaboliques et génétiques réalisés chez Raphaël au fil des années permettaient d’écarter formellement ce diagnostic de leucodystrophie, maladie héréditaire dégénérative qui aurait dû sinon s’aggraver au fil du temps, ce qui n’était absolument pas le cas. La neuropédiatre (6) qui avait évoqué ce diagnostic initialement le reconnaissait d’ailleurs formellement « Cette recherche est actuellement totalement négative, ce qui ne nous surprend pas compte tenu de l’évolution ». 

Une troisième demande de mise à jour fut donc sollicitée par les parents de Raphaël afin de faire rejeter définitivement des tablettes de la Pharmacovigilance cette fameuse leucodystrophie qui n’avait jamais existé, mais les avait stigmatisés et culpabilisés du fait du caractère génétique que cette affection sous-entendait. L’honnêteté intellectuelle de certains responsables de l’AFSSAPS (7) finit par concéder ce rectificatif, survenu après 15 ans de démarches successives, qui admettant enfin officiellement la reconnaissance « d’un épisode aigu démyélinisant post-vaccinal ».

Le cas de Raphaël n’est probablement pas isolé. Si ses parents et l’association REVAHB n’avaient pas persévéré à faire enfin reconnaitre officiellement son observation de démyélinisation post-vaccinale, son histoire serait restée méconnue. Combien de cas similaires à Raphaël sont passés ainsi pour « pertes et profits » dans les statistiques de l’AFSSAPS ?

Les données officielles (8) font état chez l’enfant de moins de 15 ans, au 31.12. 2010, de 117 notifications d’affections démyélinisantes centrales (dont 67 cas de SEP) et de 24 cas d’atteintes périphériques (Syndrome de Guillain-Barré). Sur ces bases de données, le taux estimé de démyélinisation chez l’enfant est de 0,48/100.000 enfants vaccinés. Le délai d’apparition de ces troubles neurologiques est rapide, d’un mois ou moins, pour 30% des cas. Ces données ne tiennent bien sûr pas compte de la sous-notification qui est habituelle en la matière. Une étude de l’AFSSAPS (9) destinée à comptabiliser celle-ci estimait en effet que le facteur de sous-notification  des affections démyélinisantes était alors situé entre 2 et 2,5.

La sous-notification est probablement également de mise dans la majorité des pays où cette vaccination est recommandée. Cependant, on imagine facilement qu’un effet indésirable rarement observé (1 à 3 fois pour 100.000 injections vaccinales) peut passer inaperçu s’il n’est pas systématiquement signalé à la Pharmacovigilance. Un exemple de cette situation à l’extérieur de nos frontières nous est venu du Maroc où la presse s'est faite l'écho du cas d'un enfant de 20 mois qui avait développé un syndrome de Guillain-Barré post-vaccinal dont il a malheureusement gardé de lourdes séquelles(10). Sans la médiatisation de cette observation, liée à la plainte déposée contre le laboratoire SKB producteur du vaccin (qui a été condamné par la justice marocaine), cet autre cas de démyélinisation post-vaccinale aurait été banalisé. 

L’argument de l’absence de myéline chez le nourrisson qui laisserait croire que celui-ci ne risque absolument rien sur ce plan est donc manifestement totalement faux. Il est relayé par des médecins qui, soit font preuve d’une totale incompétence en physiologie du jeune enfant, soit d'une malhonnêteté intellectuelle. On entendait il y a une trentaine d’années des affirmations similaires à propos du nouveau-né et du nourrisson qui ne pouvaient pas  ressentir la douleur car son système nerveux était soi-disant immature…

     
Si l’on veut prendre des renseignements sérieux sur ce sujet, il suffit d’aller sur le site de l’hôpital de la Pitié-Salpetrière (11) où, à propos de la physiologie du système nerveux, on peut lire ceci à propos de la myélinisation: « C'est la fabrication de la myéline autour des axones. La myélinisation des axones est un phénomène destiné à accélérer la vitesse de conduction. La myéline apparaît sur les nerfs dès le 4ème mois de grossesse et se termine vers 2 ans. Les derniers centres myélinisés seront les grands centres du langage, de la gnosie (connaissance), de la praxie (action) ».

La myéline existe donc et se développe progressivement mais rapidement chez tous les nourrissons. Une démyélinisation peut donc se produire. Quelques rares observations sont rapportées après une vaccination contre l’hépatite B. Même si ces observations semblent exceptionnelles, il faut en tenir compte et ne pas les nier. Il faut savoir que le risque zéro n’existe pas en matière de complications post-vaccinale. On voit d’ailleurs mal pourquoi un vaccin qui déclenche parfois une SEP chez un adulte prédisposé serait totalement anodin dans les premières années de vie sur un système nerveux en voie de développement.



Dominique LE HOUÉZEC

[1] B.KOUCHNER. Débat télévisé  «Le Monde de Léa» Antenne 2. 1998
[2] P.BÉGUÉ. Pédiatrie Pratique 1999. N° 104 : 8 
[3] AFSSAPS «Vaccination hépatite B, mise à jour des données de pharmacovigilance» Février 2000: page 3
[4] G.PONSOT. Lettre du 2 mai 2000 aux parents de Raphaël
[5] AFSSAPS. Commission nationale de Pharmacovigilance du 29 mai 2007
[6] O.BOESPFLUG-TANGUY. E-mail du 1er novembre 2007 aux parents de Raphaël
[7] C.KREFT-JAIS. Communication personnelle du 2 décembre 2010.
[8] AFSSAPS. Compte-rendu de la Commission nationale de Pharmacovigilance du 27 septembre 2011
[9] AFSSAPS - D.COSTAGLIOLA. Etude capture-recapture dans « Vaccination anti-hépatite B. Mise à jour des données et des études de pharmacovigilance » Février 2000: pages 3-4
[10] Site de l'association REVAHB
[11] Site du CHU Pitié-Salpétrière    

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