BPA ou BISPHÉNOL A, comment et pourquoi ce nom nous est devenu à la fois familier et inquiétant depuis quelques temps ?
Cette molécule avait été initialement produite comme œstrogène de synthèse pour lutter contre l’infertilité féminine. En fait le BPA n’avait finalement jamais été utilisé dans cette indication supplanté par le Distilbène plus puissant et devenu depuis de sinistre mémoire. Ce sont ensuite les chimistes de l’industrie du plastique qui l’ont redécouvert, dans les années 50, pour ses propriétés à se polymériser et fournir un plastique transparent et résistant à la chaleur, le polycarbonate. Cet "œstrogène-like" s’est donc ainsi reconverti dans la composition des biberons en plastique, des emballages alimentaires plastifiés ainsi que dans les résines tapissant l’intérieur des boîtes de conserves ou des canettes. Le BPA fait donc partie de notre environnement quotidien comme le démontre une récente étude de l'INSERM qui le retrouve dans les urines de 96% des femmes enceintes de plusieurs régions françaises. Le chauffage, au micro-ondes ou au bain-marie, de même que l’acidité des aliments contenus dans ces divers récipients favorise le relargage du BPA vers le contenant. L’absorption répétée de cette molécule aboutit à une imprégnation chronique non négligeable, en particulier chez le fœtus et le nourrisson, touchant une période de la vie d’organismes en pleine croissance et transformation.
C’est vers la fin des années 90 que des soupçons sur la toxicité du BPA ont été émis devant la succession d’expérimentations animales mettant en évidence, en particulier, des effets nocifs sur l’appareil reproducteur. Les publications épidémiologiques concernant l’homme ne se sont pas révélées plus rassurantes: risque de prématurité à la naissance, dysfonction sexuelle chez l’homme, forte corrélation avec l’obésité, le diabète et les maladies cardio-vasculaires à l’âge adulte.
Une étude expérimentale française réalisée plus récemment sur des cultures de testicules foetaux humains (issus de produits d'avortements) mis en présence de très faibles doses de BPA (2 µg/l) est formelle quant à la nocivité de cette molécule in vivo [3]. On observe une réduction de la production de testostérone, et de l'expression d’une autre hormone testiculaire (INSL 3) qui est nécessaire à la descente des testicules dans les bourses au cours du développement. Ceci pourrait donc être une des causes des défauts congénitaux de masculinisation (type hypospadias et cryptorchidisme) dont la fréquence a globalement doublée depuis 30 ans. Selon René Habert, le promoteur de cette étude « il se peut également que le bisphénol A participe à la chute de la production spermatique et à l’augmentation de l’incidence du cancer testiculaire chez l’adulte observés au cours des dernières décennies.»
Il est également probable que l'ingestion de BPA soit en cause dans la progression de la fréquence de l'obésité chez l'enfant et l'adulte. A lire sur ce même site l'article intitulé "Le BPA fait du gras".
[2] http://www.anses.fr/PMEC00N901.htm
[3] N’Tumba-Byn T, Moison D, Lacroix M, Lecureuil C, Lesage L, et al. Differential Effects of Bisphenol A and Diethylstilbestrol on Human, Rat and Mouse Fetal Leydig Cell Function PLoS ONE 2012, 7(12): e51579.
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